Crue historique du fleuve Amazone

Le 16 Mai 2012, le niveau du fleuve Amazone près de la ville de Manaus, capitale de l’Etat brésilien d’Amazonas et plus grande ville d’Amazonie, a dépassé son record historique enregistré depuis 1902. Depuis cette date, chaque jour voir le record historique être battu.

Vue aérienne de l’inondation © SENAMHI Perou

Cette situation fait suite aux inondations historiques plus en amont au sein des affluents du fleuve Amazone, au Pérou notamment. Le 4 avril dernier, le niveau du fleuve Amazone dans sa partie amont au Pérou avait déjà  dépassé son record historique dans la ville d’Iquitos, en aval de la confluence de ses deux principaux formateurs, les fleuves Ucayali et Marañón. Le 19 Avril un nouveau record absolu y était établi et c’est la propagation de cette crue qui se poursuit désormais en aval au Brésil.

Depuis le début de l’année, le fleuve Amazone et ses principaux affluents présentent des hauteurs d’eau très élevées. En janvier, le niveau de la rivière Marañon, un des principaux affluents de l’Amazone était déjà deux mètres au-dessus de la valeur habituelle à cette date, et le niveau atteint au début du mois d’avril au Pérou est le plus élevé jamais enregistré, soit depuis 42 ans.

Jusqu’à début avril, plus de 140 000 personnes ont été affectées par les inondations dans la province de Loreto (Pérou) et notamment sa capitale Iquitos, et de nombreuses infrastructures (collèges, centres de santé etc..) dans les principaux centre urbains ont été sinistrés. Face à cette situation, les autorités péruviennes ont déclaré l’état d’urgence dans la région depuis le mois d’Avril. Au Brésil, les inondations provoquent également d’importants dégâts, perturbant l’économie et la vie de nombreuses communautés le long des cours d’eaux, unique voie de communication pour la plus grande partie des habitants de la région. Ce sont actuellement près de 400 000 personnes qui y sont touchées. Dans le seul état d’Amazonas, dont la capitale est Manaus, ce sont 50 régions administratives sur les 62 que comptent cet état qui ont déclaré l’état d’urgence.

Surveillance par l’observatoire HYBAM

L’Observatoire de Recherche en Environnement HYBAM (« Contrôles géodynamique, hydrologique et biogéochimique de l’érosion/altération et des transferts de matière dans le bassin de l’Amazone »), est une structure portée par l’Institut français de Recherche pour le Développement (IRD), le laboratoire GET au sein de l’Observatoire Midi-Pyrénées de l’Université de Paul Sabatier de Toulouse, en partenariat avec plusieurs universités et services hydrologiques des pays de la région du bassin Amazonien (Brésil, Pérou, Bolivie, Equateur, Venezuela, Colombie). Cet observatoire mesure l’hydrologie et la géochimie des eaux Amazoniennes afin de fournir sur le long terme des observations de qualité sur le devenir du plus grand bassin hydrographique du monde, représentant à lui seul près de 20 % des apports en eaux en provenance des surfaces émergées aux océans, hors calottes polaires.

Les équipes de terrain de l’observatoire HYBAM en partenariat avec les services hydrologiques du Pérou (SENAMHI), du Brésil (ANA et CPRM) et l’Université de l’état d’Amazonas (UFAM) ont pu enregistré les débits historiques des fleuves Amazoniens ces dernières semaines par des techniques acoustiques (ADCP) introduites par les équipes françaises dans ces pays depuis 1995. Le 12 Avril dernier, un débit de 55000 m3/s était mesuré près d’Iquitos tandis que le 26 Mai dernier, un débit  de 260 000 m3/s a été enregistré à la station d’Obidos, 700 km en aval de l’embouchure du fleuve à l’Océan Atlantique. La coopération entre les groupes de recherche français et les pays de la région permet de suivre au mieux l’évolution de cette crue exceptionnelle qui s’inscrit dans une suite rapprochée d’évènements extrêmes pour un bassin habitué à des variations internannuelles limitées.

Des extrêmes hydrologiques de plus en plus fréquents

En effet, la crue de 2012 du fleuve Amazone fait partie d’une série d’évènements extrêmes qui sont devenus fréquents depuis quelques années en Amazonie. Au Pérou, les deux niveaux les plus élevés du fleuve Amazone des 40 dernières années ont été enregistrés en 2009 et 2012 tandis que les plus faibles datent de 2005 et 2010. Par ailleurs entre 2010 et 2011, l’Amazone dans sa partie péruvienne a connu une transition sans précédent, par sa rapidité, entre les périodes de basses et hautes eaux. Au Brésil on enregistre les mêmes phénomènes : la crue de 2009 avait été la plus importante jamais enregistrée près de la ville de Manaus en 100 ans de mesures. La crue de cette année est donc encore plus forte, attestant d’un enchainement inquiétant de situations hydrologiques extrêmes.

Ces phénomènes ont attiré l’attention de la communauté scientifique mondiale et ont donné lieu à des études publiées par les scientifiques péruviens, brésiliens et français de l’observatoire ORE-HYBAM. Bien que ces évènements soient liés à la variabilité climatique régionale et en particulier aux changements d’une année sur l’autre de la température de surface des océans Pacifique et Atlantique, les spécialistes n’écartent pas que ces extrêmes s’inscrivent dans le cadre du changement climatique et qu’ils soient également liés à la déforestation.

Contact: Jean-Michel Martinez

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