Altération chimique des continents : coup d’œil vers le futur

Altération chimique des continents : coup d’œil vers le futur

La croissance du CO2 atmosphérique au cours du prochain siècle entraînera des élévations de température et des modifications dans la distribution des pluies et de la végétation. Ces changements, qui trouvent leur origine dans les rejets de CO2 liés aux activités humaines, auront un impact sur la vitesse de dissolution des minéraux exposés à la surface des continents. Ces réactions de dissolution consommant du CO2 atmosphérique, quelle sera la réponse de ce puits de CO2 à l’horizon 2100 ?

Les loess représente aujourd’hui 10% des surfaces continentales. En particulier, la vallée du Mississippi est recouverte par ces sédiments éoliens déposés lors de la phase de déglaciation de l’hémisphère nord il y a environ 13 000 ans. La minéralogie de ces loess est constituée d’un mélange de minéraux silicatés, dont la réactivité aux changements climatiques à l’échelle du siècle est supposée faible, et de minéraux carbonatés, dont la réactivité est beaucoup plus grande.

Une étude de modélisation explore la réponse de l’altération de ces loess sur la période 1950-2100. Le modèle numérique utilisé consiste en une cascade de trois modèles. ARPEGE calcule l’évolution des pluies, des vents, de l’insolation et de la température pour le scénario A1B du GIEC. CARAIB, utilisant cette climatologie, calcule la distribution et la productivité de la végétation. Enfin, WITCH récupère l’ensemble de ces sorties pour calculer la dissolution des minéraux sur un transect nord-sud couvrant toute la vallée du Mississippi.

L’étude montre que c’est dans la partie centrale de la vallée, vers 37°N de latitude, que l’altération augmentera le plus vite dans le futur, en réponse à un accroissement important du drainage des profils d’altération. A l’inverse, au sud (30° latitude) et au nord (42° latitude), la dissolution des minéraux devrait ralentir, ce qui réduit l’efficacité de la consommation de CO2 de ces zones dans le futur. La cause principale en est le développement d’épisodes d’aridité de plus en plus fréquents. L’article introduit le concept de lysocline terrestre, qui est la ligne définissant la profondeur du front d’altération des minéraux carbonatés présents dans les loess. L’évolution future globale de cette ligne (par exemple accélération de son approfondissement dans la partie centrale de la vallée ou décélération de son approfondissement aux extrémités nord et sud du transect d’étude) a une implication directe sur l’acidification des océans.

Ces travaux sont publiés dans la revue « open access » Biogeosciences, de l’European Geoscience Union.

Contact : Yves Goddéris, Jacques Schott

Sources :

Goddéris Y., Brantley S.L., François L.M., Schott J., Pollard D., Déqué M., Dury M. Rates of consumption of atmospheric CO2 through the weathering of loess during the next 100 yr of climate change. Biogeosciences, 10, 135-148, 2013.

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