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Le rôle des fluides dans la croûte continentale profonde
24 mars 2016 @ 10h30 – 12h00 CET
Il existe une grande variété de fluides au sein de la croûte continentale : des fluides riches en eau aux liquides silicatés anhydres produits lors de la fusion partielle en passant par les saumures et les fluides à CO2. Il est aujourd’hui bien connu que la présence de fluides et leurs propriétés contrôlent à la fois la résistance mécanique des roches (fracturation, séismes, rhéologie) et les aspects cinétiques et transfert de matière (concentration des ressources minérales par exemple). Cependant, de nombreuses zones d’ombre persistent : quels sont les paramètres qui contrôlent la production de ces fluides, ainsi que leur distribution et temps de résidence dans les roches ? Quelles sont les modalités d’interactions de ces fluides avec les roches encaissantes (échelle microscopique) et les conséquences sur la rhéologie de la croûte (échelle métrique à crustale) ? Je présenterai ici deux exemples d’interactions entre des fluides crustaux et les roches encaissantes dans la Région des Gneiss de l’Ouest en Norvège.
Le premier exemple concerne l’implication des liquides silicatés lors de la collision calédonienne, et plus particulièrement lors de l’exhumation des roches d’ultra-haute pression. Nous avons montré que certaines des migmatites de la Région des Gneiss de l’Ouest se sont formées lors de fusion par destabilisation des minéraux hydroxylés (muscovite principalement) à basse pression. Ce type de réaction de fusion est bien connu dans de nombreux orogènes et accompagne la fin de l’exhumation en domaine ductile. De plus, la découverte de nanogranites (inclusions micrométriques dérivant d’un liquide silicaté) dans des grenats éclogitiques, nous a amené à proposer que la fusion partielle a pu démarrer dès le pic de ultra-haute pression. Des liquides silicatés ont donc été produits sur une large gamme de pression (du pic à P>2.5 GPa jusqu’aux basses pressions ≈ 0.5 GPa), accompagnant ainsi l’exhumation des roches d’ultra-haute-pression dès le déclenchement de cette dernière.
Le second exemple concerne le rôle des fluides (aqueux ou riches en CO2) lors des réactions de granulitisation. Les monzonites, aussi appellées mangerites, précambriennes de Flatraket montrent à la fois le développement de couronne de grenats entre plagioclases magmatiques et minéraux ferro-magnésiens mais aussi des veines de grenats formant des incursions à l’intérieur des plagiolcases magmatiques. La croissance de couronnes autour de minéraux magmatiques est généralement interprétée comme une croissance lente en l’absence de fluide. Le développement des veines de grenat, de même composition que les couronnes, indique lui la présence d’un fluide. De plus, des inclusions fluides primaires sont observées dans les grenats des deux types de textures, indiquant donc la présence d’un fluide lors de la croissance du grenat dans les conditions de pression et de température du faciès des granulites.