Bénézeth P., Castillo A., Delerce S., Destrigneville C., Gisquet P., Harrison A., Hermanska M., Lamérand C., Marieni C., Mavromatis V., Monnin C., Noiriel C., Oelkers E., Pokrovski G., Pokrovsky O., Saldi G., Schott J., Shirokova L.
Le groupe possède une reconnaissance internationale de longue date dans la détermination des propriétés thermodynamiques et cinétiques des minéraux et des espèces aqueuses dans les fluides géologiques, en utilisant méthodes expérimentales et analytiques, technologies innovantes et modélisation. Ses compétences en chimie inorganique sont étendues vers le monde organique, en explorant le rôle de l’activité bactérienne dans la précipitation des minéraux ainsi que dans la production de gaz dans différents contextes géologiques. Les expertises du groupe sont appliquées à l’étude des phénomènes d’interactions fluides-roches(-microorganismes) dans divers environnements naturels, allant des sources hydrothermales et gisements de métaux au pergélisol de la Sibérie.
1- Réactivité minérale (dissolution/précipitation) et détermination des propriétés thermodynamiques et cinétiques
Depuis plus de 30 ans, ce groupe est spécialisé dans la détermination des propriétés thermodynamiques des minéraux et leur cinétique de dissolution/précipitation lors des interactions avec les fluides. Plusieurs types d’expériences associées à des dispositifs dédiés (réacteurs de basse température, cellule à hydrogène, réacteurs Parr de type batch et mixed-flow, cellule optique) et en utilisant des technologies de pointe (potentiométrie, spectroscopie Raman in situ, tomographie aux rayons X, analyse de gaz avec infrarouge non dispersif) sont disponibles et constamment développés afin d’étudier la réactivité des minéraux et le réactif.
Image: Dissolution de un cristal de calcite étudié par micro-tomographie aux rayons X (Noiriel et al., 2020).
2- Modélisation expérimentale de la précipitation des minéraux carbonatés lors de l’activité bactérienne
L’objectif de cet axe est de caractériser et quantifier les processus de couplage activités cyanobactériennes – précipitation des minéraux dans le système H2O-CO2-Ca-Mg-Si-Fe, en contexte de biofilms phototrophes cyanobactériens aux conditions de la biominéralisation ancienne, notamment à des pH acides et basiques ainsi que des températures élevées. Les résultats contribuent à une meilleure connaissance des processus de minéralisation opérant dans les biosphères du Précambrien. Cet axe est pluridisciplinaire reposant sur nos expertises en minéralogie, biogéochimie et microbiologie ainsi qu’en spectroscopie.
Image : Incubation bactérienne avec la précipitation de minéraux silicates en présence d’une souche de Synechococcus sp.
3- Modélisation expérimentale de l’impact du dégel du pergélisol sur la biogéochimie des lacs sub-arctiques
Le but de ces études est d’évaluer l’impact de l’activité microbienne (production primaire / minéralisation) sur les cycles biogéochimiques des éléments grâce à la mise en œuvre d’outils combinés géochimiques, physico-chimiques et microbiologiques. Nous cherchons à évaluer les impacts climatiques sur les émissions et l’enfouissement du carbone dans les lacs thermokarstiques arctiques et subarctiques de l’Eurasie du Nord, où ces lacs sont très abondants sur les tourbières gelées. Cette étude simultanée des cycles biogéochimiques des éléments et des paramètres contrôlant l’activité microbiologique nous permettra i) de prédire les réponses des systèmes naturels aux changements climatiques et aux interventions humaines (sous forme de pollution organique ou métallique) et de ii) quantifier les variations des flux de carbone inorganique et organique sous l’action microbienne afin de mieux comprendre le changement du cycle biogéochimique du carbone au niveau des lacs subarctiques suite au réchauffement global et à l’augmentation de la pCO2 atmosphérique dans les prochaines 10-50 années.
Image : Vue aerial des lacs sub-arctiques en Siberie. Credits : G. Istigechev.
4- Géochimie organique abiotique liée à la serpentinisation de basse température
L’oxydation des métaux contenus dans les minéraux et la réduction de l’eau produisent une phase gazeuse enrichie en hydrogène et des eaux à pH très élevé (jusqu’à 12,5) que nous avons échantillonnées dans les sources hyperalcalines des ophiolites (Oman, Italie, Nouvelle Calédonie) et du plancher océanique (volcans de boue des Mariannes, IODP Exp366). Les questions soulevées vont de l’origine de la vie, des ressources énergétiques (hydrogène naturel), du cycle du carbone ou encore des modes d’altération du plancher océanique. Ces eaux hyperalcalines sont les plus réductrices de l’environnement terrestre, jusqu’au point où le champ de stabilité de l’hydrogène est atteint à température ambiante. De tels environnements sont le lieu de développement de microorganismes chimiolithotrophes qui vivent de l’hydrogène et du méthane produits par la serpentinisation. On y a aussi dosé des molécules organiques simples (acétate, formate) dont le mécanisme de formation (abiotique? biogénique?) n’est pas élucidé. Nous comptons poursuivre la caractérisation de ces milieux hyperalcalins en vue de compléter nos connaissances des cycles du carbone et de l’azote.
Image: Source du Lac Lavagnina (Ligurie, Italie). La source déverse des eaux à pH 11.5 qui conduisent à la formation de concrétions carbonatées.
5- Fluides aux conditions extrêmes
Pour accéder aux propriétés des phases fluides et magmas opérant à haute température et pression, il est nécessaire d’utiliser des approches expérimentales et analytiques in situ. L’application de telles méthodes (e.g., spectroscopie d’absorption X et Raman) aux conditions jusqu’à présent considérées extrêmes, constitue l’objectif clé de notre groupe de recherche, afin d’étudier les phénomènes d’interaction fluides-minéraux(-magmas) lors de la subduction et la transition magmatique-hydrothermale. Nos travaux visent à étudier la spéciation et la solubilité des éléments volatils (soufre, carbone) et des métaux stratégiques et critiques (e.g., Au, Mo, Cu, PGE, Ge, Ga, Re, In…) via une approche expérimentale et analytique combinée, analyser les données dans le cadre d’équations d’état associant données macroscopiques et moléculaires, afin de créer des modèles prédictifs pour les confronter aux observations naturelles. Une partie de ce programme est menée dans le cadre des projets ANR RadicalS et LISZT.
Image: Approches in situ de la cellule enclume-diamant couplée à la spectroscopie Raman pour étudier les fluides et magmas in situ (Colin et al., 2020).